Atopie et allergie : les liaisons dangereuses

Les enfants et nourrissons souffrant de dermatite atopique (DA) sont plus à risque de développer d’autres manifestations atopiques, notamment les allergies alimentaires, que ceux n’ayant pas d’antécédent de DA1.

Cas clinique

Fatou, 3 mois, est amenée par sa maman en consultation pour difficultés alimentaires et une croissance difficile. De fait, son poids, taille et périmètre crânien sont inférieurs au 3e percentile. Fatou ne boit que la moitié de ses biberons, difficilement. À l’examen, on note un eczéma diffus, étendu malgré un traitement par dermocorticoïdes. Des IgE spécifiques contre les protéines du lait de vache sont positives. Un traitement par hydrolysat poussé de protéines est instauré.

Traitement et recommandations

L’eczéma atopique est une maladie inflammatoire chronique, prurigineuse et récurrente de la peau, souvent associée à une sensibilisation allergique2. Une altération primaire de la barrière épidermique induit une augmentation de la perméabilité aux allergènes alimentaires et une sensibilisation secondaire à ces allergènes3. En cas d’eczéma modéré ou sévère, l’existence d’une allergie alimentaire associée doit être recherchée. Dans la plupart des cas, les IgE spécifiques sont présents, mais environ 10 % de ces allergies aux protéines du lait de vache (APLV) sont non-IgE médiées4.
Pour les nourrissons allaités, une élimination des produits laitiers du régime alimentaire maternel et de l’enfant est recommandée. En première intention, pour des nourrissons sous formule infantile, une formule aux hydrolysats poussés de protéines doit être proposée4, 5.

Signes à repérer

Le risque d’allergie alimentaire est plus grand chez les nourrissons qui ont un eczéma ou une dermatite atopique précoce et étendue6. Dans la large cohorte en population générale de Martin et al., 10 % des nourrissons avec eczéma avaient une APLV associée contre 1,6 % des nourrissons sans eczéma6.

Évolution du cas clinique

Chez Fatou, l’eczéma étendu diagnostiqué avant l’âge de 3 mois et traité par dermocorticoïdes, en plus de difficultés de croissance, était très suggestif d’APLV. La réalisation d’IgE spécifiques est souvent contributive dans cette indication. À 4 mois, Fatou fait une bronchiolite avec persistance d’un encombrement rhinobronchique et parfois d’un frein expiratoire. Un traitement par aérosol est débuté. Sous hydrolysat, sa croissance pondérale et staturale a bien repris. Il persiste un eczéma diffus, mais mieux contrôlé sous dermocorticoïdes à la demande.

Conclusion

La dermatite atopique du nourrisson peut être un des symptômes classiques d’APLV, les lésions cutanées d’eczéma favorisant la survenue des allergies alimentaires. En cas d’eczéma précoce, étendu et d’autant plus qu’il existe un autre symptôme évocateur associé, il convient de la rechercher.


1. Martin PE, Eckert JK, Koplin JJ et al. HealthNuts Study Investigators. Which infants with eczema are at risk of food allergy? Results from a population-based cohort. Clin Exp Allergy 2015 ; 45 : 255-64.
2. Weidinger S, Novak N. Atopic dermatitis. Lancet 2016 ; 387 : 1109-22.
3. Badina L, Barbi E, Berti I et al. The dietary paradox in food allergy: yesterday’s mistakes, today’s evidence and lessons for tomorrow. Curr Pharm Des 2012 ; 18 : 5782-7.
4. Kemp AS, Hill DJ, Allen KJ et al. Australian consensus panel. Guidelines for the use of infant formulas to treat cows milk protein allergy: an Australian consensus panel opinion. Med J Aust 2008 ; 188 : 109-12.
5. Dupont C, Chouraqui JP, de Boissieu D et al. French Society of Paediatrics. Dietary treatment of cows’milk protein allergy in childhood: a commentary by the Committee on Nutrition of the French Society of Paediatrics. Br J Nutr 2012 ; 107 : 325-38.
6. Martin PE, Eckert JK, Koplin JJ et al. Which infants with eczema are at risk of food allergy? Results from a population-based cohort. Clincal & experimental allergy 2014 ; 45 : 255-64.

 


Publié

dans

par

Étiquettes :