Eczéma du nourrisson : apprendre aux parents à le prévenir

Cas clinique

Tom, 7 mois, présente depuis l’âge de 2 mois et demi des lésions prurigineuses siégeant au niveau des joues et des faces antéro-externes des cuisses. La maman a constaté une tendance à la chronicité des lésions avec des troubles du sommeil et une aggravation des signes à l’occasion des poussées dentaires. Sa croissance est satisfaisante.

Diagnostic et recommandations

Le diagnostic de la dermatite atopique (DA) est clinique et anamnestique. Il n’est pas nécessaire de faire des examens complémentaires pour prendre en charge un patient porteur d’une DA1. En revanche, le rôle possible d’allergènes comme facteurs pérennisants de certaines formes, la résistance au traitement, lors d’une stagnation ou d’une cassure de la courbe staturo-pondérale, l’apparition d’une allergie de contact doivent conduire à des explorations allergologiques1.
Celles-ci sont aussi justifiées par la possibilité d’obtenir à court terme un impact bénéfique direct sur la dermatose : mesures d’évictions alimentaires ou d’allergènes respiratoires. Les tests allergologiques ne permettent pas d’établir le pronostic individuel de la DA qui, dans la majeure partie des cas, est favorable
avec une guérison 1 fois sur 2 avant l’âge de 2 ans. Actuellement, ceux-ci ne sont que rarement pratiqués dans ce cadre (7,6 % des enfants ayant souffert de DA dans une enquête menée en Midi-Pyrénées) et l’eczéma associé à une sensibilisation à IgE représente 47 à 75 % selon les études2. Rappelons que la positivité d’un test allergologique (sanguin ou cutané) ne prouve pas que l’allergène testé soit responsable des manifestations.
Une enquête d’imputabilité clinique doit être menée. Les enfants porteurs d’une DA ne sont donc pas tous a priori « allergiques » !

Signes à repérer

  • L’âge de début : il se situe habituellement dans les premiers mois de vie (60 à 80 %)3.
  • La topographie des lésions : joues, menton, front, faces d’extension des membres chez le nourrisson. Bilatérales et symétriques. Après 2 ans, l’atteinte des plis de flexion devient prédominante, mais elle peut également toucher le cou, les mains, les chevilles, les paupières.
  • L’aspect des lésions : érythémateuses à limites émiettées, suintantes puis crouteuses, prurigineuses lors des poussées. À un âge plus avancé, la peau devient épaissie (lichénification) et la sécheresse est plus marquée.
  • L’évolution naturelle : cette dermatose évolue de façon chronique et/ou récidivante émaillée par des poussées.
  • Les facteurs déclenchants ou aggravants : aggravation hivernale et amélioration estivale, infections, choc émotionnel.

Prise en charge

Le traitement est exclusivement symptomatique et préventif à défaut de traitement étiologique. Il repose en grande partie sur l’éducation et l’implication des parents. Il comporte un volet de prévention des poussées :

– toilette à l’eau tiède (27-30 °C) avec des pains ou gels sans savon (pH = 6),
– utilisation d’émollients directement après le bain au long cours (souvent coûteux),
– éviter les lainages et les textiles synthétiques à grosses fibres à même le corps et privilégier le coton et le lin,
– éviter l’exposition au tabac,
– vacciner normalement.

Le traitement symptomatique des poussées est basé sur l’application indispensable de dermocorticoïdes à visée anti-inflammatoire. On privilégiera ceux à activité modérée (groupe 2), notamment chez le nourrisson ou sur les lésions du visage ou des paupières. Les dermocorticoïdes d’activité forte (groupe 3) seront utilisés en cure courte sur les lésions très inflammatoires. La durée d’application sera maintenue jusqu’à disparition du prurit et des lésions3. Pour autant, il n’est pas utile de les appliquer plus de 2 fois par jour en début de traitement (4 à 5 jours). On diminue ensuite la fréquence d’application en les espaçant sur quelques jours avec un relais par des émollients.
Dans ce cadre, il n’y a pas lieu de faire des amalgames avec les effets secondaires des corticoïdes pris par voie systémique ! La corticophobie cutanée étant responsable d’un sous traitement et d’une pérennisation des lésions.
Les antihistaminiques seront utilisés en cas de prurit de même que les émollients afin de limiter la xérose.

Conclusion

La dermatite atopique est une maladie chronique et récidivante. Il est important de donner des explications claires aux parents pour éviter déception et incompréhension lors des poussées, de les éduquer et de les impliquer dans le traitement préventif des poussées, fondé sur le respect des mesures adjuvantes et préventives. Le diagnostic est clinique, établi sur l’anamnèse et l’examen clinique. Le traitement classique des poussées repose sur les dermocorticoïdes et la lutte contre les infections. On considère qu’il ne faut pas utiliser en moyenne plus de 30 g/mois de dermocorticoïdes de niveau 2 chez un nourrisson (les effets secondaires observables ne sont que locaux et réversibles2). Les explorations allergologiques ne se font que dans des situations précises, et leurs
résultats seront toujours confrontés à la clinique.


1. Conférence de consensus sur la prise en charge de la dermatite atopique de l’enfant. Société française de Dermatologie 2005.
2. Rancé F. Quelle est l’utilité des examens complémentaires pour le diagnostic et la prise en charge de la dermatite atopique ? MT Pédiatrie 2007 ; 10 : 69-80.
3. Toulon A. Dermatite atopique. Éduquer au bon maniement des dermocorticoïdes. La Revue du praticien 2015 ; 29 : 505-10.


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