Accouchement par césarienne

L’accouchement par césarienne pourrait être un facteur de risque de développer plus fréquemment des allergies ou autres maladies chroniques chez l’enfant. En cause, une colonisation bactérienne intestinale différente de celle retrouvée lors des accouchements par voie basse. Cette notion mérite de retenir l’attention des obstétriciens et pédiatres.

Flore intestinale et immunité

Deux prix Nobel ont eu l’intuition de l’importance de la flore intestinale. Si l’étude de la flore intestinale, encore appelée “microbiote”, a été initiée par Elie Metchnikoff (prix Nobel de médecine en 1908), la connaissance de son implication dans le développement des maladies auto-immunes et des allergies est assez récente.

Ce sont surtout les travaux du français Jules Hoffmann, prix Nobel de physiologie en 2011 et découvreur des récepteurs Toll et de leur implication dans l’immunité innée, qui ont permis de comprendre les liens entre la flore intestinale, la muqueuse intestinale et le système immunitaire, surtout par l’intermédiaire des Toll Like Receptors (TLR).

Le nouveau-né subit une colonisation dès la naissance

Avant la naissance, le fœtus est stérile et vit dans un milieu stérile.

Lors de l’accouchement, il va subir une colonisation bactérienne progressive de son tube digestif, qui va permettre une maturation du système immunitaire intestinal et l’orientation vers un équilibre entre les lymphocytes T helpers 2 (Th2) et d’autres lymphocytes comme les Th1 et Th3 (1).

Lorsque cette colonisation se fait mal, peut se créer une dysbiose, et la réponse immune peut s’orienter soit vers des mécanismes auto-immuns, via les récepteurs Th1, soit vers des réponses allergiques, via les récepteurs Th2.

Plusieurs circonstances peuvent perturber la flore, comme les antibiothérapies par voie orale ou veineuse, surtout dans les premiers jours de la vie, mais aussi l’accouchement par césarienne et l’allaitement artificiel.

Une flore intestinale différente chez les enfants nés par césarienne

En cas d’accouchement par voie basse, le nouveau-né subit la contamination par le microbiote vaginal et fécal de la mère, lors de son passage par la voie vaginale. L’accouchement par voie basse permet une première implantation, avec des bactéries anaérobies strictes : bifidobacterium et bactéroïdies.

Lorsque l’enfant nait par césarienne, il va être colonisé par les bactéries présentes dans l’environnement de sa naissance, constitué par l’air ambiant et le personnel soignant (2). La flore qui s’implante sera moins diversifiée avec peu de bifidobactéries (3) ; elle sera surtout constituée par des espèces anaérobies facultatives (4) comme les clostridies, les entérobactéries, les entérocoques, les staphylocoques ; Bifidobacterium et bactéroïdes vont s’implanter plus tard.

Ces perturbations de la flore peuvent perdurer jusqu’à 6 mois (5), voire 7 ans pour certaines études (4).

La césarienne : défavorable à l’allaitement

L’accouchement par césarienne est responsable d’une montée de lait moins favorable et d’un temps d’allaitement raccourci.

Sont en cause, l’absence du stress de l’accouchement qui est responsable, lors de l’accouchement par voie naturelle, de l’augmentation de plusieurs hormones dont le cortisol, la prolactine et l’ocytocine (6) stimulante de la montée laiteuse, et l’absence de contraction de l’utérus stimulant la production d’ocytocine.

En cas de césarienne, les pics d’ocytocine sont moins fréquents et l’élévation de la prolactine moins importante, ce qui n’est pas favorable pour l’allaitement maternel.

Les césariennes programmées extraient des bébés plus tôt et moins matures, dont le réflexe de succion est moins efficace et conduit à l’abandon rapide de l’allaitement maternel.

Dans certains pays (comme au Porto Rico), les instances de santé préconisent de moins recourir à la césarienne pour obtenir un allaitement optimal.

Enfants nés par césarienne : des pathologies plus fréquentes

Plusieurs études portant sur des cohortes appréciables (une série de 13 058 enfants nés par césarienne versus 20 337 enfants nés par voie basse, une série de 50 000 enfants nés par césarienne versus voie basse) ont montré que le fait d’être né par césarienne augmente le risque de présenter un asthme, des allergies ou des rhino-conjonctivites allergiques, des gastro-entérites et des troubles intestinaux ; une étude a retrouvé un risque augmenté de 20 % de présenter un asthme sur une population de
150 000 enfants (7-11).

A 8 ans, on retrouve une fréquence d’asthme plus élevée chez les enfants nés par césarienne dont les parents sont allergiques, mais aussi un impact sur le risque allergique plus élevé chez les enfants dont les parents ne présentent pas d’allergie (12).

Conclusion

Il est indéniable que l’étude du microbiote est une façon d’appréhender l’enfant dans son environnement, dès sa naissance.

Toute modification de la flore bactérienne intestinale habituelle, reflet de l’adaptation de l’homme à son environnement, peut avoir des répercussions sur les différentes immunités.

Y penser, en particulier si l’accouchement a eu lieu par césarienne, c’est mettre en place une prévention, surtout sur les terrains à risque.

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