Critères de Rome IV

En mai 2016 est parue une nouvelle version des critères diagnostiques de Rome permettant de classer les troubles fonctionnels digestifs. Voici ces critères de Rome IV pour les nourrissons et enfants en bas âge, avec les différences notables par rapport aux critères de Rome III.

Les régurgitations du nourrisson

Les critères diagnostiques des régurgitations sont les mêmes que les critères de Rome III. Ils sont définis par la présence d’au moins 2 épisodes de régurgitation par jour depuis au moins 3 semaines en l’absence d’autres symptômes associés comme des nausées, une hématémèse, des apnées, des fausses routes, des troubles de la croissance, des difficultés alimentaires, des difficultés de déglutition ou de troubles posturaux.

Quand on demande aux experts les nouveautés sur le RGO en 2016, la réponse en anglais se résume en 3 mots : « Not so much… »

Syndrome de rumination ou mérycisme

La durée des symptômes pour porter le diagnostic a été écourtée à deux mois. La liste des symptômes doit comporter :

  • des contractions répétées des muscles abdominaux, du diaphragme et de la langue,
  • des régurgitations sans effort du contenu gastrique, qui peut être craché ou remâché ou ravalé,
  • et au moins 3 des signes suivants :

– Début entre l’âge de 3 et 8 mois.

– Absence d’amélioration sous traitement bien conduit du reflux gastrooesophagien et des régurgitations.

– Pas d’autres signes d’alerte.

– Des symptômes qui ne surviennent pas pendant la nuit ni lorsque l’enfant interagit avec son environnement ou d’autres individus.

Ces symptômes du nourrisson sont difficiles à prendre en charge et nécessitent une approche bipolaire psychosomatique.

Syndrome cyclique de vomissement

Le nombre d’épisodes nécessaires au diagnostic a été réduit à 2 au lieu de 5. Les symptômes doivent associer :

  • Au moins 2 épisodes de vomissements paroxystiques avec ou sans nausées, d’une durée allant de quelques heures à plusieurs jours dans les 6 mois.
  • Ces épisodes sont stéréotypés pour un même patient.
  • Ces épisodes sont espacés de semaines ou de mois avec retour à l’état basal entre eux.

Pour beaucoup, ce syndrome s’apparente à une migraine abdominale et peut dans certains cas être traité avec succès par des médicaments antimigraineux.

Les coliques du nourrisson

Les critères de Rome III consistaient en la règle des 3 : 3 heures de pleurs/ jour durant au moins 3 jours/semaine. Ces critères très stricts étaient difficiles à valider en pratique clinique et la durée de 3 heures semblait arbitraire. Dans Rome IV, ils ont été largement assouplis. Ainsi, le diagnostic en pratique clinique peut maintenant être porté chez un nourrisson associant les signes suivants :

  • Nourrisson de moins de 5 mois au début et à la fin des symptômes.
  • Épisodes de pleurs prolongés et récurrents ou d’irritabilité rapportés par la personne s’occupant de l’enfant. Ces épisodes surviennent sans cause évidente et ne peuvent être prévenus ou résolus par la personne s’occupant du nourrisson.
  • Pas de difficultés à grandir, de fièvre ou de pathologie associée.

Diarrhée fonctionnelle

Là aussi, les critères basés sur des études épidémiologiques ont été assouplis et associent :

  • au moins 4 selles volumineuses et non formées d’émission non douloureuse par jour,
  • des symptômes évoluant depuis au moins 4 semaines,
  • début entre 6 et 60 mois,
  • sans trouble de la croissance associé en cas d’apport calorique suffisant.

Nous pouvons rappeler que ces selles sont souvent émises le jour avec des débris alimentaires (même si ce n’est plus dans la définition).

Chaque praticien aura à loisir la possibilité de demander des IgA totales avec IgA anti transglutaminase pour éliminer une maladie coeliaque qui peut au début s’apparenter à une diarrhée fonctionnelle (même si classiquement le poids s’infléchit…).

Dyschésie du nourrisson

Ce cadre nosologique s’est étendu aux nourrissons de moins de 9 mois et pas seulement aux moins de 6 mois, là aussi sur la base d’études prospectives. Pour porter le diagnostic de dyschésie, il faut :

  • un nourrisson < 9 mois,
  • qui pousse et qui pleure pendant au moins 10 minutes avant l’émission ou la non-émission de selles molles,
  • et pas d’autres problèmes de santé.

Ce problème d’asynergie ou asynchronisme abdomino-pelvien est insupportable pour ces nourrissons qui poussent et se retiennent en même temps !

Constipation fonctionnelle

Les changements de critères diagnostiques concernent les enfants en cours d’acquisition de la propreté et la suppression du critère de continence chez le nourrisson portant des couches. On peut donc parler de constipation fonctionnelle chez l’enfant jusqu’à 4 ans si au moins 2 des symptômes suivants sont présents depuis au moins 1 mois :

  • Deux ou moins de 2 défécations par semaine.
  • Antécédent de rétention excessive des selles.
  • Antécédent de douleur ou de défécation difficile.
  • Antécédent de selles très volumi- neuses.

Présence d’une large masse fécale dans le rectum. Chez l’enfant ayant acquis la propreté, les critères suivants peuvent être utilisés :

  • Au moins 1 épisode par semaine d’incontinence.
  • Antécédent de selles très volumineuses ayant obstrué les toilettes.

Comme vous le constatez, on peut donc être constipé en allant tous les jours aux toilettes !

En bref

De façon générale, Rome IV colle plus à la réalité du clinicien pour décrire et classer plus simplement ces troubles fonctionnels digestifs de l’enfant. Cette classification est un outil très utile en pratique.

 

Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts en relation avec cet article.


1. Benninga MA, Faure C, Hyman PE, St James Roberts I, Schechter NL, Nurko S. Childhood functional Gastrointestinal Disorders : Neonate/Toddler. Gastroenterology 2016 ; 150 : 1443-55.


 


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