Des recommandations européennes sur la gastro–entérite utiles en pratique ?

Les nouvelles recommandations conjointes de l’European Society for Pediatric Gastroenterology, Hepatology, and Nutrition (ESPGHAN) et de l’European Society for Pediatric Infectious Diseases (ESPID), sont parues en 2014, actualisant celles de 2008 [1]. Le point sur ce qui a été dit lors du dernier congrès de la Société française de pédiatrie.

La gastro-entérite aiguë (GEA) est définie comme une diminution de la consistance des selles (liquides ou molles) et/ou une augmentation de leur fréquence (> 3 dans les 24 heures), avec ou sans fièvre ou vomissements.
Cependant, un changement de la consistance des selles est plus révélateur de diarrhée que le nombre de selles, en particulier dans le premier mois de vie. La diarrhée aiguë dure le plus souvent moins de 7 jours et jamais plus de 14 jours.
L’incidence de la diarrhée varie de 0,5 à 2 épisodes par an chez les enfants < 3 ans en Europe.

Le rotavirus est l’agent pathogène le plus fréquent à cet âge. Cependant, le norovirus, représentant 10 à 15 % des hospitalisations en Europe, devient la principale cause de diarrhée dans les pays à forte couverture vaccinale contre le rotavirus.

Les agents bactériens les plus fréquents sont, selon les pays, soit Campylobacter sp, soit Salmonella sp.

Une étude rétrospective sur une durée de 15 ans montre une diminution significative des infections à Salmonella sp et une augmentation des infections à norovirus et sapovirus.

Le Clostridium difficile est un pathogène émergent, mais dont la pathogénicité chez l’enfant de moins de 2 ans est toujours discutée. Les infections intestinales sont par ailleurs une cause majeure d’infection nosocomiale [2].

Facteurs de gravité

Les facteurs de gravité d’une gastroentérite aiguë sont :

– un âge < 2 mois,
– une maladie sous-jacente,
– des vomissements persistants,
– plus de 8 selles/j,
– des signes sévères de déshydratation.

Une évaluation de la déshydratation est proposée par le comité de l’ESPGHAN (Tableau 1) pour l’enfant de 1 à 36 mois. Simple d’utilisation et reproductible, elle a été validée par plusieurs études et est corrélée au besoin d’une réhydratation IV, de bilan biologique et d’hospitalisation.

Bactérie ou virus ?

Une fièvre élevée (> 40°C), des selles sanglantes, des douleurs abdominales et des signes neurologiques sont plus fréquemment associés à une diarrhée bactérienne tandis que des vomissements et des symptômes respiratoires associés évoquent plutôt une étiologie virale.
Ni la CRP, ni la PCT, ni l’importance de la déshydratation ne permettent, à ce jour, de discriminer les deux étiologies. En ce qui concerne les gastro-entérites bactériennes, les antibiotiques ne sont préconisés que pour certains pathogènes et des tableaux cliniques particuliers [1].

Intérêt d’une antibiothérapie

Une méta-analyse incluant 1 748 enfants et adultes, souffrant de dysenterie à Shigella sp a conclu qu’une antibiothérapie appropriée raccourcissait la durée de la fièvre, de la diarrhée et réduisait les complications (syndrome hémolytique et urémique) [3]. Le traitement recommandé est l’azithromycine (5 jours).

En ce qui concerne les Salmonella sp, l’antibiothérapie n’est pas efficace sur les symptômes et n’empêche pas les complications. Elle favorise une prolongation du portage. Les antibiotiques ne doivent donc être prescrits dans les GEA à salmonelles que chez les enfants à risque d’infection extra-intestinale et de bactériémie (nouveau-nés et les nourrissons < 3 mois, déficit immunitaire, asplénie, traitement immunosuppresseur).

De même, en ce qui concerne les infections à Campylobacter sp, l’antibiothérapie est recommandée principalement pour la forme dysentérique. Elle ne réduit les symptômes que si elle est instituée précocement (3 premiers jours de la maladie). Le traitement de choix est l’azithromycine.

Les antibiotiques ne doivent pas être systématiquement prescrits dans les infections à E. coli. Elle n’est pas recommandée pour les E. coli producteurs de shigatoxines. Elle l’est par contre pour les E. coli entérotoxinogènes.

Le premier traitement de la GEA à Clostridium difficile est l’arrêt des traitements antibiotiques en cours et leur remplacement par le métronidazole oral en première intention.

> Le choix d’une antibiothérapie empirique dépend de la prévalence locale des trois principaux pathogènes (Shigella spp, Campylobacter spp, et Salmonella enterica) et de leur profil de résistance.

  • Chez les enfants atteints de diarrhée aqueuse, une antibiothérapie n’est pas recommandée, sauf si le patient a voyagé récemment ou peut avoir été exposé au choléra. Les diarrhées sanglantes évoquant une shigellose doivent être traitées.
  • Il est nécessaire de traiter les enfants hospitalisés ou les enfants fréquentant les garderies pour réduire la transmission de Shigella et Campylobacter.

L’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêts concernant la rédaction de cet article.


Références :

1. Guarino A, Ashkenazi S, Gendrel D et al. European Society for Pediatric Gastroenterology, Hepatology, and Nutrition/European Society for Pediatric Infectious Diseases Evidence-Based Guidelines for the Management of Acute Gastroenteritis in Children in Europe: Update 2014. J Pediatr Gastroenterol 2014 ; 59 : 132-52.

2. Tam CC, O’Brien SJ, Tompkins DS et al. Changes in causes of acute gastroenteritis in the United Kingdom over 15 years: microbiologic findings from 2 prospective, populationbased studies of infectious intestinal Disease. Clin Infect Dis 2012 ; 54 : 1275-86.


 


Publié

dans

par

Étiquettes :