La constipation fonctionnelle de l’enfant

La constipation de l’enfant est très fréquente, le plus souvent fonctionnelle. Sa prise en charge est souvent longue et parfois difficile. Il est dans tous les cas important de mettre en place les mesures adéquates pour éviter que la situation se pérennise et ne se complique.

La constipation fonctionnelle de l’enfant est un motif très fréquent de consultation en pédiatrie. En quelques chiffres, le taux médian de prévalence de la constipation chez l’enfant à travers le monde est estimé à 9 %, et 15 % des consultations pour constipation sont faites par des pédiatres [1].

La physiopathologie

D’un point de vue physiopathologique, la rétention volontaire aboutit à une disparition du besoin secondaire à un encombrement rectal avec distension. Cette dernière entraîne des anomalies de la sensibilité et de la compliance rectale qui vont pérenniser le trouble [2, 3].

Cette sensation de besoin peut disparaître totalement avec épisodes d’incontinence par perte de la capacité de se retenir ou d’exonérer lorsque le rectum se remplit. Une contraction paradoxale du sphincter anal externe avec anomalies de la dynamique de la défécation est parfois retrouvée (4). Pourtant, le biofeedback n’améliore pas toujours la symptomatologie (5). Il existe donc d’autres facteurs probablement psychologiques et comportementaux également impliqués dans la pérennisation du symptôme. Les facteurs favorisants sont :

• les antécédents familiaux de constipation ;

• une obésité ;

• ou un retard de croissance intra-utérin.

Le diagnostic

Le diagnostic s’appuie sur les critères de Rome III [6, 7] (tableau 1).

 

Il est le plus souvent évident lors de l’interrogatoire, même si parfois la fréquence ou consistance de selles normales peuvent égarer le diagnostic.

ll arrive que les douleurs abdominales soient au premier plan ou que le signe d’appel soit l’émission de selles dans le slip ou la culotte. Ces pertes fécales correspondent à une situation d’encoprésie où les débordements de selles sont des “échecs” de rétention de selles.

Elle peut être primaire, sans jamais d’acquisition de la propreté, ou secondaire après acquisition normale de la propreté, isolée ou associée à d’autres troubles (urinaires, alimentaires, du sommeil ou comportementaux).

L’examen clinique

Les objectifs principaux de l’interrogatoire et de l’examen clinique sont la recherche d’éléments en faveur d’une constipation organique (moins de 5 % des cas) (tableau 2) et l’identification de complications associées à la constipation.

 

L’interrogatoire minutieux comporte :

• l’âge de début ;

• la fréquence des symptômes ;

• la réponse aux traitements déjà entrepris ;

• la recherche d’un éventuel retard à l’évacuation du méconium ;

• la recherche d’une altération de la croissance staturo-pondérale ;

• des vomissements bilieux ou des épisodes subocclusifs itératifs ;

• l’existence de ballonnements abdominaux fréquents.

L’examen physique, incluant l’examen périnéal est complet.

Le toucher rectal n’a pas d’intérêt pour le diagnostic de constipation fonctionnelle. Néanmoins, il peut être utile dans certaines situations (signes d’alarme clinique, constipation intraitable) [8].

Les examens paracliniques

Aucun examen n’est requis en cas de constipation fonctionnelle.

L’abdomen sans préparation, souvent prescrit pour faire la démonstration de la présence ou de l’absence d’impactions fécales, a une très faible valeur discriminante. C’est le cas également de l’échographie rectale qui n’est pas recommandée en routine[ 8].

Néanmoins, certains examens peuvent être utiles en cas de doute sur une pathologie organique sous-jacente, et doivent alors être guidés par les éléments cliniques. C’est le cas par exemple de la manométrie ano-rectale, de la biopsie rectale et du lavement baryté qui sont utiles pour le diagnostic et le bilan d’une maladie de Hirschsprung, cependant de diagnostic exceptionnel après l’âge de 1 an.

La prise en charge

La prise en charge est capitale chez ces enfants pour améliorer leur confort, leur insertion sociale, et éviter des complications comme l’encoprésie (définie par l’émission de selles normales dans des endroits inappropriés après l’âge de 4 ans) ou les infections urinaires à répétition.

Les mesures hygiéno-diététiques

Les mesures diététiques, indispensables mais parfois insuffisantes, comportent plusieurs volets :

• augmentation des boissons non sucrées ;

• augmentation de la ration en fibres (pain et biscuits au son, légumes verts et fruits non farineux pour apporter l’équivalent de l’âge de l’enfant + 5 g de fibres) ;

• diminution de la consommation de sucreries, carottes, riz.

L’exercice physique joue également un rôle important. La rééducation sphinctérienne est inefficace, sauf cas particulier, dans les suites d’une anoplastie post-malformation ano-rectale.

Les traitements médicamenteux

Lorsqu’elle est nécessaire, la prise en charge médicamenteuse ne doit pas être retardée car, plus la prise en charge de la constipation est tardive, plus la guérison l’est aussi. Une prise en charge précoce améliore le pronostic : environ 80 % des enfants ont un transit normal à 6 mois lorsqu’ils sont traités précocement, contre 32 % en cas de prise en charge différée.

• Les traitements laxatifs recommandés (8) car d’utilisation ancienne et efficace en pédiatrie sont :

le PEG ;

le lactulose.

Leur durée de prescription est le plus souvent longue de plusieurs mois ou années, et il faut attendre au moins 1 mois avec un transit normal avant de les arrêter. Ensuite, même après arrêt, il faut savoir les reprendre car les rechutes sont fréquentes, évaluées à 50 % dans les 5 ans suivant la guérison.

• On peut associer à ces laxatifs un émollient, surtout en début de traitement.

Les lavements durant quelques jours peuvent être utiles pour le traitement d’un fécalome, mais ne doivent pas être prescrits sur le long terme. Par ailleurs, ils sont parfois très mal vécus par des enfants et sont à proscrire en cas de fissure anale associée (figure 1).

 

En cas d’encoprésie, il est indispensable de proposer une prise en charge globale de l’enfant et de son symptôme, car les enfants qui en sont atteints sont toujours en situation de souffrance familiale scolaire ou sociale, tant le vécu de cette situation est difficile au quotidien.

• En plus de ces traitements classiques, plusieurs autres alternatives ont été proposées mais ne sont aujourd’hui pas validées.

Ainsi, l’utilisation de probiotiques n’a pas montré d’efficacité chez l’enfant ; il n’y a pas de données scientifiques fiables sur l’impact des médecines complémentaires (acupuncture, homéopathie, etc.).

L’intérêt de la stimulation nerveuse transcutanée n’est pas non plus démontré.

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