Les différents régimes alimentaires

On estime que 2 à 5 % de la population européenne adulte a adopté un régime alimentaire de type végétarien. Beaucoup de ces végétariens partagent avec leurs enfants leurs choix diététiques. Les motivations pour choisir ce type d’alimentation sont variées : idéologiques (environnementale, protection animale), philosophiques, religieuses, de bien-être (1).

Un risque de carences alimentaires

Depuis plusieurs décennies, le risque de carences alimentaires est devenu faible dans les pays développés alors que des diététiques moins riches et plus saines ont un intérêt dans la prévention des maladies cardiovasculaires et du cancer. L’engouement pour ce type d’alimentation, bien qu’encore marginal, est réel dans nos sociétés.

Le végétarisme signifie qu’un individu ne consomme pas de chair animale, qu’il s’agisse de viandes, de poissons ou de crustacés. On distingue de nombreuses variantes au végétarisme (Tab. 1) avec l’apparition de régimes très spécifiques et parfois restrictifs.

Certains régimes sont basés en plus du type d’aliments sur leur préparation ou leur cuisson, comme les crudivores qui ne consomment que des aliments crus et peuvent être végétariens, végétaliens ou même omnivores. Les liquidariens consomment des jus en général à base de fruits ou de légumes. Les instinctos s’alimentent avec des produits non modifiés, non cuits donc crus, non assaisonnés et non mélangés. Ils ne mangent pas de blé ni de lait. Ce régime se rapproche du régime dit « paléo » dans lequel les produits issus de l’agriculture ou transformés (par la cuisson notamment) sont évités.

Certains régimes s’intègrent dans des croyances plus larges que seulement alimentaires. C’est le cas par exemple des diètes macrobiotiques, dans lesquelles il est recherché un équilibre entre les produits yin (règne végétal, piquant, acide ou doux) ou yang (règne animal, salé, amer). En pratique, cela implique la consommation de volaille ou de poisson une ou deux fois par semaine et exclut les produits laitiers. C’est le cas également du régime vegan actuellement très médiatisé (et du régime végétalien)et dont les adeptes considèrent qu’aucun produit d’origine animale ne doit être utilisé que ce soit pour se nourrir, pour s’habiller ou dans tout autre but.

De façon générale, on ne peut pas décrire les différences entre les régimes omnivores et végétariens simplement par l’éviction de certains produits, car le mode d’alimentation et les quantités consommées sont profondément différents dans les 2 groupes de population (2).

Une étude sur plus de 3 000 enfants

On connaît mal la prévalence de ces diètes spéciales. Une équipe de chercheurs a enquêté sur les régimes alimentaires des enfants d’âge préscolaire dans une ville du sud de la Suède. Plus de 3 000 enfants entre 1 et 5 ans ont pu être inclus. Au total, 6,3 % des enfants avaient une diète spéciale pour raison médicale et 12 % sans raison médicale. Les régimes spéciaux étaient l’exclusion du porc dans 7,8 % des cas, un régime végétarien dans 4,8 % des cas, une exclusion du lait dans 3,5 % des cas puis de façon moins fréquente des oeufs et du lactose dans 1,1 % des cas (3).

L’intérêt du régime végétarien chez l’adulte sur l’indice de masse corporel (BMI) et les maladies coronariennes a été montré sur plusieurs cohortes (1). Ces effets bénéfiques sont liés à une consommation plus importante de produits végétaux non raffinés, comme les graines entières et oléagineux, plus de fruits et légumes. Une consommation modérée de viande dans le cadre d’une diète omnivore riche en fruits et légumes a vraisemblablement le même intérêt.

Chez l’enfant, les données sont moins claires. En termes de croissance, les enfants omnivores ou lacto-ovovégétariens ont des évolutions similaires. En revanche, il semble que les enfants soumis à une diète vegane soient plus maigres et moins grands.

Détails des carences potentielles (Tab. 2)

Calcium

Les apports en calcium assurant une minéralisation osseuse suffisante chez l’enfant en pleine croissance sont fondamentaux. Des cas de rachitisme sur carence en calcium ont été décrits chez des enfants consommant des laits de soja qui sont assez pauvres en calcium. Une carence relative en calcium favorise le risque de fracture osseuse dans les régimes vegans de l’enfant. Cela a aussi été décrit dans un casde diète macrobiotique type vegan ayant commencé dans l’enfance. Certains produits enrichis en calcium et certains végétaux (brocolis, chou chinois) peuvent être conseillés dans ces régimes restrictifs (4).

Vitamine D

Trouver une carence en vitamine D est assez fréquent chez l’enfant. Il a été montré qu’elle est plus fréquente chez les enfants végétariens ou vegans (1). Il faut donc là aussi prévoir une supplémentation adéquate.

Vitamine B12

On ne trouve de la vitamine B12 que dans les produits d’origine animale. Les apports recommandés varient de 0,7 μg/jour chez le jeune enfant à 2 μg/jour chez l’adolescent. Sa carence prolongée entraîne des troubles hématologiques (anémie macrocytaire parfois très profonde) et des troubles neurologiques (neuropathie, troubles neuropsychiatriques) qui sont parfois irréversibles. La prévention de la carence en B12 en cas de régime sans ou avec peu de produits d’origine animale est donc fondamentale. Cela est valable aussi pour les mères végétaliennes allaitantes, de nombreux cas de carence profonde en vitamine B12 ayant été décrits chez le nourrisson allaité (5).

Fer et zinc

Il n’a pas été montré que les enfants lacto-ovo-végétariens étaient plus carencés en fer et zinc que les enfants ayant un régime omnivore.

Protéines

Dans les pays développés, les apports protéiques peuvent être correctement couverts chez l’enfant et l’adolescent même en cas de régime vegan (2). Cependant, attention aux nourrissons nourris avec des faux laits à base de soja, de riz ou d’amande qui sont en fait des laits végétaux très pauvres en nutriments. Des cas de kwashiorkor très sévères et de dénutrition profonde ont ainsi été rapportés chez des nourrissons nourris à base de ces boissons végétales, parfois prises à tort pour des « laits » adaptés par des parents végétaliens (6).

Conclusion

De façon générale, une diète lacto-ovo- végétarienne bien diversifiée permet des apports suffisants aux enfants et adolescents. En revanche, en cas de régime végétalien, les apports caloriques et protéiques doivent être calculés. Il faut aussi prévoir une supplémentation en vitamine B12, voire en calcium et zinc. Plus un régime restrictif est débuté tôt dans la vie, plus il y a de risque de carences (7).

Chez l’adolescent, ces régimes peuvent dans certains cas être des prémices de troubles du comportement alimentaire véritables. Attention donc à interroger l’adolescent sur ses motivations à adopter un régime spécifique. Des régimes de plus en plus variés sont adoptés par la population. Les connaître et analyser les risques carentiels possibles est important pour les prévenir et suivre au mieux les enfants qui ont ces types d’alimentation.

L’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêts avec la rédaction de cet article.


  1. Van Winckel M, Vande Velde S, De Bruyne R, Van Biervliet S. Clinical practice:vegetarian infant and child nutrition. Eur J Pediatr 2011 ; 170 : 1489-94.
  2. Rapport AFSSA. Apport en protéines : consommation, qualité, besoins et recommandations. 2007.
  3. Servin C, Hellerfelt S, Botvid C, Ekström M. Special diets are common among preschool children aged one to five years in south-east Sweden according to a population-based cross-sectional survey. Acta Paediatr 2017 ; 106 : 634-8.
  4. Parsons TJ, van Dusseldorp M, van der Vliet M et al. Reduced bone mass in Dutch adolescents fed a macrobiotic diet inearly life. J Bone Miner Res 1997 ; 12 : 1486-94.
  5. Pawlak R, Lester SE, Babatunde T. The prevalence of cobalamin deficiency among vegetarians assessed by serum vitamin B12: a review of literature. Eur J Clin Nutr 2014 ; 68 : 541-8.
  6. Rapport de l’ANSES – Saisine n° 2011-SA-0261.
  7. Kirby M, Danner E. Nutritional deficiencies in children on restricted diets. Pediatr Clin North Am 2009 ; 56 : 1085-103.

 


Publié

dans

par

Étiquettes :