Gastroentérite aiguë du nourrisson et de l’enfant : les données épidémiologiques et cliniques

La gastroentérite aiguë (GEA) reste la principale cause de déshydratation aiguë chez le nourrisson et l’enfant. Les études d’incidence montrent une prépondérance de cette affection chez les jeunes nourrissons. La mortalité reste un problème préoccupant, surtout dans les pays émergents atteignant ainsi près de 20 % des causes de mortalité chez les enfants âgés de moins de 5 ans. Depuis l’introduction de la vaccination anti-rotavirus, on note une diminution spectaculaire de l’incidence des formes sévères et de la mortalité dans les pays où la vaccination a été généralisée.
Ce dossier vise à apporter un éclairage récent reposant sur les dernières données de la littérature, sur les aspects épidémiologiques (Dr Jantchou), la prise en charge nutritionnelle (Dr Piloquet) et thérapeutique (Dr Bellaïche et Dr Cézard).


L’incidence des GEA varie selon les pays et les régions. A l’échelle mondiale, on considère que, chaque année, surviennent chez les enfants âgés de moins de 5 ans près de 1,4 milliards d’épisodes de GEA et près de 600 000 décès (1).

Incidence des gastroentérites aiguës chez le nourrisson et l’enfant

L’incidence des GEA varie selon les pays et les régions.
A l’échelle mondiale, on considère que, chaque année, surviennent chez les enfants âgés de moins de 5 ans près de 1,4 milliards d’épisodes de GEA et près de 600 000 décès (1).
Entre la naissance et l’âge de 3 ans, chaque nourrisson va présenter de 0,9 à 1,9 épisodes de GEA par an.

En France, chaque année, on constate près de 18 000 hospitalisations pour GEA chez l’enfant, et un nombre de 7 à 20 décès chez les jeunes enfants (2). Une étude prospective observationnelle réalisée en Bourgogne pendant un an, dans les différents secteurs de soins d’une agglomération de 250 000 habitants, met en évidence une incidence annuelle des GEA de 14,82 % et des GEA à rotavirus de 4,96 % chez les enfants de moins de 5 ans, durant la saison 2004–2005 (3).
Dans cette étude, on note également un fort impact économique des épisodes de GEA à la fois pour les coûts directs (consultations aux urgences, hospitalisations), mais aussi les coûts indirects (arrêts de travail, etc.) (4).

Prépondérance du rotavirus et place des autres virus (tableaux 1 et 2)

Le rotavirus représente l’agent infectieux le plus fréquemment incriminé dans les épisodes de GEA chez le nourrisson et l’enfant. Le norovirus est de plus en plus considéré comme un agent pathogène prépondérant dans les gastroentérites aiguës épidémiques de l’adulte, mais aussi du jeune enfant (5).
D’autres virus tels l’adénovirus, le calicivirus ou des bactéries (Campylobacter, salmonelle) sont beaucoup plus rares (6).

Une étude française récente (7), réalisée de janvier à décembre 2007 chez des enfants hospitalisés pour GEA, retrouvait une prévalence respective des virus les plus fréquents de :

  • rotavirus (21 %),
  • norovirus (13 %),
  • adénovirus (5 %)
  • et astrovirus (1,8 %).

Facteurs de risque de gastroentérite aiguë

  • La survenue d’une GEA est directement corrélée à l’existence d’un contact antérieur avec une personne contaminée. Ceci explique pourquoi certains facteurs socio-économiques, notamment en lien avec la promiscuité, l’hygiène, le mode de garde (crèche, collectivité d’enfants) représentent un risque important de survenue de GEA (6).
  • L’âge jeune est également un facteur de risque important d’infection sévère ; les nourrissons âgés de moins de 6 mois étant les plus vulnérables (6).
  • L’allaitement maternel est un facteur protecteur de survenue de GEA, mais jouerait un rôle plus faible dans la sévérité ou la durée des épisodes de GEA en Europe, contrairement aux pays émergents.
  • L’existence d’un déficit immunitaire devrait être recherchée en cas de répétition anormale ou de sévérité particulière des épisodes de GEA en fonction de l’âge de l’enfant.

Evaluation clinique devant une GEA : quels sont les critères de sévérité ?

De nombreux scores cliniques ont été étudiés afin d’identifier un ou plusieurs critères qui, associés, pourraient permettre de prédire la sévérité d’une GEA. Ces scores n’ont pas tous été validés et n’ont pas démontré une bonne reproductibilité.

  • Le poids représente toujours le gold standard. La perte de poids rapide est le meilleur critère permettant d’évaluer le degré de déshydratation en se méfiant toutefois de la possibilité d’un troisième secteur intra-abdominal.

Trois autres critères sont importants à évaluer :

  • l’allongement du temps de recoloration cutanée (> 3 secondes) ;
  • l’existence d’un pli cutané ;
  • et l’existence d’anomalies respiratoires (polypnée).

Les autres critères cliniques sont moins spécifiques pour évaluer la sévérité de la GEA mais méritent néanmoins d’être recueillis à l’examen clinique (8) :

  • la sécheresse des muqueuses ;
  • l’existence d’une hypotonie des fontanelles ;
  • la tachycardie, les extrémités froides ;
  • la faiblesse du pouls et l’apparence générale (stupeur ou hypotonie majeure).

Modification de l’épidémiologie des GEA à rotavirus après programmes vaccinaux

Depuis la généralisation des programmes de vaccinations anti-rotavirus dans de nombreux pays (Etats-Unis, Belgique, Brésil, Australie, etc.), ceux-ci ont vu une diminution nette de l’incidence des GEA à rotavirus, à la fois en ce qui concerne les formes sévères, mais aussi en population générale, même chez les sujets non vaccinés (effet indirect) (9, 10).

Aux Etats-Unis, la couverture vaccinale selon les données les plus récentes avoisine les 72 % (11).
En France, le comité de vaccination s’est prononcé en 2006 et avait proposé de différer la vaccination systématique des nourrissons pour une période d’au moins deux ans.

Malgré les recommandations de sociétés savantes – le Groupe Francophone d’Hépatologie, Gastroentérologie et Nutrition Pédiatriques (GFHGNP) (12), l’ESPGHAN (European Society for Paediatric Gastroenterology, Hepatology, and Nutrition) et l’ESPID (European Society for Paediatric Infectious Diseases) (13) – de généraliser la vaccination anti-rotavirus à tous les nourrissons en Europe (hors facteurs de risque individuels de complications), la vaccination n’est pas inscrite dans le calendrier vaccinal français et n’est pas remboursée en 2010.

 

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