Troubles de l’oralité

Après l’identification d’un trouble de l’oralité chez un nourrisson ayant des difficultés alimentaires, se pose la question de sa prise en charge pratique. Le travail de prise en charge a pour but d’aider l’enfant à investir le toucher, à trouver du plaisir à être touché et du plaisir oral.

Le trouble de l’oralité, rappels…

Le trouble de l’oralité est favorisé par :

  • une prématurité,
  • un reflux gastro-oesophagien,
  • une pathologie organique,
  • le recours à une nutrition artificielle prolongée, etc.

Il est le plus souvent lié à une hypersensitivité corporelle et/ou sensorielle qui se repèrent par :

  • des attitudes de défense tonicoposturales (hyperextension, détournement de la tête) ;
  • une difficulté/un refus à toucher les objets ;
  • le refus d’ouvrir les lèvres ou la bouche ;
  • des nausées-vomissements ;
  • ou encore des troubles du comportement (agitation, colère, pleurs, endormissement, évitement, etc.).

Les étapes de la prise en charge

Dans un premier temps, l’identification des blocages de l’enfant au niveau corporel et tactile est primordiale afin de proposer des activités adaptées. Cela passe par une observation attentive de l’enfant dans ses mouvements et son développement psychomoteur.

Puis, ensuite, si les défenses corporelles sont absentes ou minimes, sa relation avec la nourriture (regarder, sentir, toucher) sera évaluée :

  • son comportement alimentaire et les textures/quantités qu’il accepte de manger ;
  • ses praxies buccales en termes de succion, déglutition, mastication ;
  • sa relation aux objets.

Dans tous les cas, l’implication des parents est indispensable.

Aider l’enfant à investir son corps

Pour aider l’enfant à investir son corps, on peut proposer :

  • des massages francs ;
  • la marche pieds nus en fonction de l’âge ;
  • des jeux d’approche visuelle et tactile de matières en plastique ou en bois, puis de matières plus douces (pompons, balles, plumes, etc.), de la peinture (en rouleau ou au doigt), de la pâte à modeler, flocons de maïs, de la nourriture (semoule, pâtes, etc.).

Devant une hypersensitivité tactile, les aliments à présenter sont d’abord de texture franche et sèche, plus facile à “apprivoiser” que les matières mouillées. La plus difficile étant la structure collante.

Si l’enfant met les mains dans la confiture sans appréhension, l’exploration de la sphère orale est alors possible.

Retrouver le plaisir oral

Ces jeux axés sur le toucher et l’être touché pourront ensuite être associés à des jeux axés sur le plaisir oral :

  • Sollicitations olfactives et périorales au niveau du visage (du lobe de l’oreille vers la bouche). Massage du visage associant des mouvements de rotation et d’étirement au niveau des joues, du front, du menton, des tempes ; massages autour des lèvres.
  • Jeux de bisous avec une poupée, devant un miroir pour les plus grands.
  • Exploration orale des contenants (tétine, cuillère, verre, jeux de dinette, etc.).
  • Approche progressive d’aliments : goût familier et apprécié sur le bord des lèvres.

Ce n’est qu’une fois les défenses corporelles, tactiles et visuelles, disparues que le travail oral peut débuter.

La désensibilisation endobuccale

Les jeux de désensibilisation endobuccale seront débutés par des massages francs.
Il s’agit de massages endobuccaux très appuyés et très rapides, d’abord de faible amplitude, en partant de la ligne médiane du palais et des gencives, puis d’amplitude plus importante.
Ces massages endobuccaux doivent être renouvelés plusieurs fois dans la journée, en faisant bien attention de respecter la tolérance de l’enfant et ne pas déclencher de réflexe nauséeux.
Ces massages sont généralement maintenus plusieurs mois.

Ces jeux de désensibilisation endobuccale peuvent être réalisés en jouant à manger avec une cuillère vide, par des jeux de mobilité avec la langue, en jouant à se brosser les dents, les gencives, la langue ; pour les plus de un an, jouer à croquer, mâcher, etc.

Imaginons un aliment qui vous est insupportable de goûter (les épinards pour certains, la cervelle pour d’autres !). Il faut bien avoir en tête, dans ces travaux de “désensibilisation”, qu’on ne peut mettre en bouche ce qu’on ne peut prendre dans sa main. On ne peut prendre dans sa main ce qu’il nous est impossible de toucher ou de sentir. On ne peut toucher ce qu’on ne peut voir. Il faut donc faire tout le travail dans le chemin inverse avant de toucher à la bouche.

Ces différents exercices aident le nourrisson et l’enfant à réinvestir cette sphère orale à trouver du plaisir à manger à pleine bouche. Dans tous les cas, il est primordial de ne pas forcer l’enfant et de le laisser avancer à son rythme.

Une approche multidisciplinaire

Cette prise en charge peut être longue et doit être multidisciplinaire, associant pédiatre, psychologue, orthophoniste, psychomotricien, etc. L’intérêt de consultations pluridisciplinaires, associant par exemple pédiatre et psychologue ou pédiatre et orthophoniste ou pédiatre et psychomotricien, est maintenant reconnu et permet d’avoir des approches complémentaires.

La coopération et l’investissement des parents dans ce travail de guidance pour trouver du plaisir oral est indispensable à la prise en charge.

Des groupes de parole peuvent permettre aux parents d’échanger leur vécu, et des associations comme le groupe MIAM MIAM (Mouvement InterAssociatif pour Mieux manger) sont investies dans le suivi de ces troubles de l’oralité.

Pour en savoir plus …


Publié

dans

par

Étiquettes :